Le dispositif des Certificats d’économies d’énergie (CEE) repose sur un principe simple : les fournisseurs d’énergie (électricité, gaz, carburant, etc.), appelés « obligés », sont tenus de financer des actions d’économies d’énergie chez les consommateurs. Pour cela, ils versent des primes aux particuliers, entreprises ou collectivités qui réalisent des travaux améliorant la performance énergétique.
Ces primes CEE peuvent être mobilisées par les artisans, directement ou via des partenaires, pour faire baisser le coût des travaux pour leurs clients. Elles sont donc devenues un outil incontournable dans la rénovation énergétique.
Chaque type de travaux donnant droit à des CEE est défini dans une fiche d’opération standardisée (FOST). Ces fiches précisent :
• les conditions techniques minimales à respecter (performances, matériaux, certifications, etc.)
• les pièces justificatives à produire
• le montant de certificats délivrés (en kWh cumac)
Certaines fiches concernent des gestes simples (remplacement d’une chaudière, isolation d’un plancher…), d’autres des projets globaux. C’est le cas de la fiche BAR-TH-174, qui encadre la rénovation thermique d’ampleur d’une maison individuelle, et la BAR-TH-175, l’équivalent pour les appartements.
Mais attention : cette fiche, souvent vantée pour ses primes généreuses, cache des pièges majeurs. Elle n’est mobilisable que dans des cas très spécifiques, et peut conduire à l’échec du dossier si elle est mal utilisée.
📌 Pourquoi la fiche BAR-TH-174 ne peut presque jamais être mobilisée
Dans la fiche BAR-TH-174 (version A70-2, en vigueur depuis le 15 janvier 2025), un point juridique précis et méconnu interdit, dans la majorité des cas, sa mobilisation pour des travaux de rénovation d’ampleur.
Voici ce que le texte dit exactement :
« Un demandeur de certificats d’économies d’énergie ne peut assurer le rôle actif et incitatif mentionné à l’article R. 221-22 du code de l’énergie que dans les cas où le bénéficiaire et le logement ne vérifient pas les conditions d’éligibilité à la prime au titre de la dépense éligible mentionnée au 15 de l’annexe 1 du décret n° 2020-26 du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique. »
(source : fiche BAR-TH-174 vA70-2, § final page 11 et en annexe page 16)
Autrement formulé dans la section 3 de la même fiche :
« Hors l’agence mentionnée à l’article L. 321-1 du code de la construction et de l’habitation [c’est-à-dire l’ANAH], un demandeur de certificats d’économies d’énergie ne peut assurer le rôle actif et incitatif mentionné à l’article R.221-22 du code de l’énergie que dans les cas où le bénéficiaire et le logement ne vérifient pas les conditions d’éligibilité à la prime au titre de la dépense éligible mentionnée au 15 de l’annexe 1 du décret n° 2020-26 du 14 janvier 2020. »
En clair : dès lors qu’un ménage et son logement sont éligibles à MaPrimeRénov’ Rénovation d’ampleur (le fameux « parcours accompagné »), la fiche BAR-TH-174 ne peut pas être utilisée.
💣 Les pièges de la fiche BAR-TH-174
Ce qu’elle promet : une valorisation très élevée des CEE pour des rénovations d’ampleur (parcours accompagné, avec audit, etc.).
Mais… cette fiche :
=> est conditionnée à des critères très stricts (saut de classe énergétique, recours à un MAR agréé, bouquet de travaux).
=> est réservée aux cas très spécifiques non-éligibles MPR.
=> impose un audit énergétique conforme, un suivi rigoureux et une complexité administrative décourageante pour certains artisans ou ménages.
=> est généralement gérée par les gros obligés ou les délégataires spécialisés, donc peu personnalisée pour des chantiers locaux à taille humaine.
👉 Conclusion : à réserver à certains cas bien ciblés. Dans les autres cas, le geste par geste peut être plus simple, rapide et rentable.
🧩 Pourquoi les plus gros obligés ne sont pas les meilleurs alliés pour des chantiers locaux
=> Volume contre proximité : les grands obligés (EDF, Total, Auchan, etc.) cherchent du volume pour remplir leurs obligations, donc favorisent les gros programmes ou les partenariats avec des acteurs industriels.
=> Moins de réactivité : délais de traitement longs, plateformes peu accessibles pour les petits artisans ou accompagnateurs.
=> Moins d’accompagnement : ils ne s’impliquent pas dans les détails du terrain ni dans la qualité du montage de dossier.
👉 Ce qu’il faut : des partenaires locaux ou impliqués sur le terrain, qui savent gérer des projets de proximité, accompagner les artisans, proposer du préfinancement ou de l’avance de prime.
🛠 Le geste par geste : encore et toujours pertinent !
Pourquoi le valoriser ?
=> Il reste possible même en dehors du parcours accompagné, donc accessible aux ménages qui ne peuvent ou ne veulent pas faire une rénovation globale.
=> Il permet de capter des chantiers modestes qui seraient autrement laissés de côté.
=> Il est plus simple administrativement : une fiche, une action, un artisan.
Intérêt pour les artisans :
=> Mobilisable facilement dans le cadre de devis standards.
=> Moins de temps administratif pour plus de réactivité.
🏢 Les CEE dans le tertiaire : une opportunité encore trop méconnue
Qui est concerné ? : toutes les personnes morales, bailleurs publics ou privés, collectivités, commerçants, professions libérales, entreprises…
Quels travaux ? : isolation, systèmes de chauffage performants, ventilation, régulation, etc.
Bon à savoir :
=> Les dossiers sont souvent oubliés, car les interlocuteurs n’ont pas le réflexe CEE.
=> Pas besoin de MPR, les CEE tertiaires sont hors champ ANAH.
👉 À valoriser dans la gestion locative ou les petites copropriétés tertiaires.
🚨 Gare aux promesses trop belles pour être vraies
Depuis l’annonce de la suspension de MaPrimeRénov’ Rénovation d’ampleur pendant l’été 2025, on observe une recrudescence inquiétante de publicités agressives autour des CEE : isolation à 1 €, travaux « sans reste à charge », financement garanti de la fiche BAR-TH-174, etc.
➡️ Ces messages, souvent relayés par des plateformes nationales ou des centres d’appels peu scrupuleux, peuvent induire les particuliers comme les artisans en erreur. Ils ne tiennent pas compte des critères techniques, réglementaires et administratifs que ces dispositifs exigent réellement.
👉 Rappel essentiel : aucune prime CEE ne peut être versée sans dossier conforme, justificatifs complets, respect des fiches et vérification des conditions d’éligibilité. Un chantier mal orienté ou mal documenté peut bloquer les financements ou même exposer à des demandes de remboursement.
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